La citation est de Jacques Perret ; j’y songe chaque fois que j’arrive en retard à un rendez-vous, c’est-à-dire, hélas, fort souvent. Suivant l’importance et l’enjeu du rendez-vous, la tentation est forte de se trouver des excuses, réelles ou imaginaires. Dans la vie moderne, à Paris, elles ne manquent pas: les transports et les embouteillages en fournissent une bonne part; la vie domestique peut également être utile au retardataire puisque personne ne peut vous reprocher de vous occuper de vos enfants quand la nécessité s’en fait sentir.

Que l’excuse soit réelle (parfois) ou inventée (souvent), il y rentre la plupart du temps beaucoup de mensonge; c’est que nos visées sont ambiguës. Car, objectivement, les causes du retard intéressent bien peu souvent notre patient rendez-vous; dès lors pourquoi lui rompre la tête avec ce qui ne le regarde pas? Sans doute espérons-nous ne pas compromettre l’enjeu de notre rencontre qu’elle fut personnelle ou professionnelle; ou est-ce le souvenir douloureux d’arrivée tardive à l’école qui nous fait rougir et nous excuser comme des écoliers?… A mes enfants d’ailleurs qui, comme chacun, arrivent parfois en retard à l’école souvent par ma propre faute, on demande des comptes et des raisons. C’est là, je le crains, fort mauvaise éducation. C’est leur faire croire qu’une bonne excuse absout et fait disparaître la “faute”.

Je n’en crois rien car je crois à la fois Jacques Perret et que le mensonge, le mensonge gratuit dont nous parlons ici, est faute pire encore. j’entends faute vis-à-vis de soi-même. A vouloir diminuer ainsi l’amertume d’un plaider coupable (présenter ses excuses sans se défendre), en se trouvant des circonstances atténuantes, nous entamons notre dignité, en achetant l’estime de l’autre à crédit. Mais les crédits demandent à être remboursés, généralement avec force intérêts…

La “force d’âme”, le joli nom de cette vertu cardinale qu’on appellerait aujourd’hui le courage, est je crois précisément là: affronter sans détour les circonstances où nous nous sentons pris en défaut; ne plus se faire subir la minuscule humiliation d’une circonstance atténuante; arriver la paix dans l’âme en retard à un rendez-vous et ne pas chercher à diminuer en aucune façon le manquement à nos obligations par de vaines justifications.

Surtout quand notre vis-à-vis est plus encore en retard que nous…

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