L’ailleurs est ici
A la question « qui es-tu ? », Séverine répond : « je suis une artiste ». Comme si cela résumait toute la réponse. Une artiste aujourd’hui, mais qui a mis du temps à en arriver là. Un long chemin depuis l’Afrique, l’Asie où elle a suivi son père expatrié, où elle a gagné, dit-elle, un goût pour les différences, l’altérité ; jusqu’au quartier de la Goutte d’or où elle s’est établie en famille. Un long chemin sur trois jambes. La famille donc, avec Philippe et leurs trois enfants – un appétit pour le chiffre 3, peut-être –, une aventure exigeante et une grande chance, dit-elle, qui lui a permis de prendre soin ; prendre soin de l’enfance de ses enfants, prendre soin de sa propre enfance. La thérapie, deuxième jambe, qui lui a permis de trouver l’art puis qui a nourri son art, si fortement que Séverine devient thérapeute. Enfin le pouvoir de créer, dans l’art, dans la thérapie, créer une vision du monde. L’artiste, dit Séverine, est celui qui voit le monde autrement et offre aux autres la chance de pouvoir le comprendre un peu mieux. C’est le grand choc de ma vie, dit-elle, que l’autre ne pense pas comme moi. J’ai mis du temps à le comprendre et, finalement, c’est le plus enrichissant. L’autre est autre, l’ailleurs est ici, offert et je ne veux pas passer à côté de ce qui est offert. J’accepte de me laisser guider par ça, même quand c’est difficile, même quand c’est conflictuel car même avec de l’imparfait – et ma propre imperfection – on peut faire du beau. Du beau et de l’utile, ici et maintenant, c’est-à-dire ailleurs.
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Crédit photo: Dagmara Bojenko
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