La tenue prochaine de notre stage, « Entreprendre, un voyage héroïque », est l’occasion d’évoquer ce qui sous-tend notre travail : raconter une histoire, entraîner par la narration et permettre à chacun d’écrire sa propre histoire.

Le « flow »

Nous avons tous fait l’expérience, enfant ou plus tard, d’être totalement absorbés dans une histoire, de se laisser emporter dans le « flow », état qui se caractérise par une totale absorption dans une activité, ici celle d’écouter et de suivre l’histoire.

Depuis toujours, les hommes ont raconté des histoires. Légendes, mythes, contes et mêmes ces blagues qu’on se raconte à la fin du repas. Celles-là me plaisent particulièrement parce qu’elles cachent souvent, derrière l’humour, quelque chose de grave. Une façon finalement d’évoquer des choses profondes avec légèreté. Ainsi, dans un autre registre, des chansons de notre enfance.

Si l’on en croit certains exégètes, Une souris verte cacherait la torture d’un soldat vendéen ; Meunier, tu dors parlerait de la révolution française ; Au clair de la lune parlerait à mot couvert de sexe ainsi que À la claire fontaine.

Ainsi des histoires qui, si l’on y prête attention, parlent de la mort, de la différence, de la peur, bref de la vie. Les contes, quant à eux, recouvrent souvent une réalité plus complexe. Le temps leur a permis d’agréger une sorte de sagesse humaine, qui s’est sédimentée dans des récits d’apparence simplistes.

Quoi qu’il en soit, ces histoires ont le pouvoir de nous captiver, dès lors qu’elles sont servies par quelqu’un qui les raconte avec conviction.

Donner du sens

Une histoire se déroule, c’est un truisme, de son début à sa fin. Elle est comme la ligne tracée d’un point à un autre par le géomètre. Elle dessine donc une direction, tout comme un trait sur le papier, avec un sens. Autrement dit, elle dessine un cap. Si nous jouons avec l’ambiguïté du terme en français, nous ne savons pas si la quête de sens des individus est une quête de signification ou une quête de direction, de cap. Si le sens répond à la question : « savoir où l’on va » ou à « savoir pourquoi on y va ».

Je ferais volontiers le pari que la plupart d’entre nous va opter pour le « pourquoi », mais – qu’on me traite d’outrecuidant – je ne suis pas certain de la validité de cette réponse. Tout comme nous aimons être emporté dans une histoire, qu’il s’agisse d’un livre, d’un film ou d’un conte, nous aimons être emportés dans des projets, dans des aventures.

À cela s’ajoute que fort peu d’entre nous apprécie de se voir imposer une raison de vivre ou, plus simplement, une raison de travailler. Qui a vraiment envie qu’on lui dise pourquoi il fait ce qu’il fait ?

De la nécessaire ambiguïté des histoires

« Comment veux-tu que je te donne l’heure, si je démonte ma montre ? » disait un de mes premiers patrons, amateur de blagues, quand on lui demandait d’expliquer un trait d’humour. Les histoires en effet ne s’expliquent pas car chacun y comprend ce qu’il veut et, si nous rions tous ensemble, c’est peut-être par malentendu ; et si on nous explique, alors l’histoire n’est plus drôle du tout.

Dès que l’histoire est plus sophistiquée, ainsi des légendes, mythes et contes, alors la compréhension diverge davantage encore. C’est bien la force des histoires que de rassembler un si grand nombre de gens, sur des motifs aussi variés. Qu’il suffise de voir ce que l’imagination humaine a tiré des grands mythes de l’humanité, depuis Œdipe ou la Genèse jusqu’à la biographie plus ou moins arrangée des grands de ce monde.

Au fond, une histoire donne une direction tout en permettant à chacun de trouver son pourquoi.

Un berceau pour des histoires

J’ai parlé dans d’autres articles, par exemple ici, de Joseph Campbell et de son Héros au mille et un visages, ouvrage où il propose une sorte de trame universelle pour les histoires. Que cette trame soit valide ou non d’un point de vue scientifique, est une question à laquelle je ne m’attellerai pas ici et qui n’est pas mon propos.

Son travail a trouvé un écho dans deux disciplines : le développement personnel ; j’y reviens un peu plus loin. Le cinéma, notamment avec Christophe Vogler qui a en tiré son Guide du scénario grâce auquel un nombre incalculable de scénarios ont été écrits, à Hollywood et ailleurs. Les films produits – et le succès qu’ils ont rencontré – montre la puissance, sinon l’universalité du processus, à commencer par Star wars, presque un cas d’école de l’application de la trame de Campbell.

De même que Alain et moi avons fait le pari que, dans notre séminaire « Entreprendre, un voyage héroïque », ce schéma narratif allait permettre aux participants de se laisser emmener dans une histoire transformatrice, de même je crois que chacun peut s’approprier cette trame pour raconter sa propre histoire et, à l’instar du conteur qui captive son auditoire, susciter de l’adhésion autour de son projet.

Ceci sans avoir à se charger de la responsabilité de leur « donner du sens », comme un oiseau donnerait la becquée à ses oiselets, mais en laissant chacun trouver sa place, trouver la signification de l’histoire qu’il entend.

J’ai parlé plus haut des stages de développement personnel qui s’inspire du voyage du héros de Campbell. À certains égards, c’est en effet dans cette lignée que, Alain et moi, nous nous inscrivons. Cependant, nous ne croyons pas que la trame de Campbell ait, en soi, un effet transformateur ni ne soit porteuse d’une magie. Nous croyons que la magie, si elle existe, est le produit de notre propre imaginaire, à chacun de nous, et que son véhicule est les histoires que nous racontons.

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